Amnésie temporaire

samedi 19 mars 2005

Au diable

J'en profite pour dire tout le bien que je pense de la maison d'édition qui a commis La parabole des talents : Au diable Vauvert. Une maison qui se définit comme "indépendante, alternative et de convictions". Tout un programme. Et je dois dire que par les temps qui courent, l'indépendance d'une maison d'édition est une chose qui se fait rare, et donc qui devient précieuse. Quand en plus, elle est alternative et de convictions, je suis charmé. Et quand la conviction est qu'"un humanisme nouveau doit et va trouver à s'exprimer", et qu'on trouve pèle-mèle mauvais genres et documents sans distinction de collection, je dis BANCO ! Les découvrir, c'est les adopter !!

Parmi ceux que j'ai déjà dévorés et adorés, en plus des deux paraboles d'Octavia E. Butler, il y a :

  • La folie de Dieu et Rihla (récits initiatiques dans des univers historiques fantastiques) de Juan Miguel Aguilera,
  • L'évangile du serpent et L'ange de l'abîme (Tomes 1 et 2 de la trilogie des prophéties) de Pierre Bordage,
  • American Gods (mythologies celtiques et nordiques contre mythes modernes) de Neil Gaiman

La folide Dieu Rihla L'évangile du serpent L'ange de l'abîme American Gods



La parabole des talents

La parabole des talents ''Tout ce que tu touches
Tu le changes.

Tout ce que tu changes
Te change.

La seule vérité permanente
Est le Changement.

Dieu est Changement.''

Fin - provisoire - de ma période science-fiction et humanisme. J'ai terminé hier la lecture de La parabole des talents d'Octavia E. Butler, livre pour lequel j'avais déjà témoigné de mon intérêt ici. J'avais beaucoup aimé le premier tome, La parabole du semeur, qui raconte, à travers son journal, l'histoire d'une toute jeune femme noire, Lauren, dans un futur proche où la société américaine est en pleine désagrégation. Fille de pasteur, elle crée son propre univers religieux, Semence de la Terre, autour d'une idée phare : Dieu est changement. Après la destruction de la communauté dans laquelle elle a grandi et la mort des siens, elle fuit sur les routes. Au hasard des rencontres et des dangers, elle consolide sa foi et commence à prêcher.

On retrouve dans La parabole des talents l'héroïne à travers son journal au fur et à mesure de sa découverte par sa fille. La communauté qu'elle a fondé se développe, mais les temps ne sont pas appaisés et l'intégrisme religieux menace. J'ai repris avec enthousiasme le cours de cette histoire, retrouvé des personnages forts, et l'espoir, jamais éteint, de construire un monde meilleur. J'ai lu quelque part sur la toile qu'il s'agissait d'un roman de sf féministe. Eh bien oui ! Les femmes SONT et FONT cette histoire d'espoir et de lutte qui pourrait être notre tellement le futur décrit par l'auteur trouve des échos dans les germes pourris de la situation actuelle.

J'ai donc repris avec enthousiasme cette histoire, et je n'ai pas été déçu. L'écriture est agréable, malgré quelques utilisations abusives du passé simple que je mets sur le compte de la traduction, et l'utilisation du journal de l'héroïne, mise en perspective par la lecture qu'en fait sa fille des années après l'action, permet de garder une unité au récit malgré son étalement sur plusieurs années. Enfin, la référence à la parabole des talents à deux reprises - au début et à la fin du livre - n'a pas manqué de questionner mon ignorance en la matière (mes seuls cours de catéchisme ont été les BD dans Astrapi et Okapi !!). Quel sens y donner dans le contexte du livre ? J'ai donc farfouillé sur la toile dans l'espoir de ne pas passer à côté de l'interprétation de cette parabole.

Car le royaume des cieux est semblable à un homme sur le point d'accomplir un voyage en terre lointaine. Il appelle auprès de lui ses serviteurs et leur distribue ses biens. A l'un, il remet cinq talents ; à l'autre, deux ; au troisième, un seul. A chacun, il donne selon ses capacités respectives. Puis sans attendre, il se met en route.
Celui qui avait reçu cinq talents s'en fut négocier avec quelqu'un qui possédait une somme équivalente et l'opération lui permit de récolter cinq nouveaux talents. Celui qui en avait reçu deux fit de même. Le dernier, à qui l'on n'avait remis qu'un seul et unique talent, creusa un trou dans le sol où il enfouit l'argent confié par son maître.
Lontemps après, celui-ci revint et fit comparaître ses serviteurs. A chacun de ceux qui avaient su faire fructifier la somme remise, il tint le discours suivant : "C'est bien, bon et fidèle serviteur, tu as su te montrer digne de la confiance que j'avais placée en toi, je puis désormais m'en remettre à tes mérites et te confier un vrai trésor. Entre, sois le bienvenu dans la joie du Seigneur."
Quant à celui qui s'était contenté d'enterrer son talent de peur de le perdre, le maître parla en termes sévères : "Mauvais serviteur, homme paresseux... Sachant que j'avais moissonné là où je n'avais pas semé, et récolté là où je n'avais pas fertilisé, tu aurais dû remettre le talent reçu entre les mains du banquier. A mon retour, j'aurais ainsi trouvé mon capital enrichi des fruits de l'usure. Qu'on lui retire ce talent pour le remettre à celui qui en a déjà dix. Car les vertueux recevront davantage et seront comblés ; en revanche le misérable se verra privé de tout, même du peu qu'il possède.

Bible du Roi James Evangile selon Saint Mathieu, 25, 14-30

L'explication la plus claire de cette parabole, je l'ai trouvée ici. Il faudrait voir dans la parabole une description du jugement dernier. "Ainsi pour avoir part au salut, il ne suffit pas d'écouter la parole de Dieu, il faut la mettre en pratique pour lui faire porter du fruit. (...) L'optique est celle d'une exhortation à se montrer actif en faisant passer dans ses actes le message évangélique."

Le sens de la parabole est illustré par le récit de Lauren qui consacre sa vie à transmettre le message d'espoir qu'elle a construit à partir des évangiles que son père, pasteur, lui a enseigné. Je ne suis pas certain de ne pas avoir perdu une interprétation en route, mais en tout cas je comprends un peu mieux le titre du livre et j'ai la satisfaction de ne pas être passé à côté d'éléments importants comme ça a été le cas lors de ma lecture de La grande faucheuse de James Morrow.



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