Amnésie temporaire

mardi 6 septembre 2005

Limitation aux situations moyennes

Où comment il est très difficile de vraiment envisager le pire

Un entretien dans le Libé du 02 septembre avec Patrick Lagadec, spécialiste de la gestion de crise. Il pointe du doigt un élément qui me semble important dans le cadre de la gestion de crises. Ce qui est particulièrement intéressant, c'est que cela s'applique aussi à la gestion des problèmes globaux, qu'ils soient écologiques (le réchauffement climatique), économiques (l'ère de l'énergie chère) ou civilisationnels (l'impossibilité de la généralisation d'un mode de société basé sur le développement et la croissance économique).

Un nouvel exemple d'un problème plus fondamental, classique des situations de crise : aller au-delà des cadres mentaux habituels ne nous est pas aisé, pour les dirigeants comme pour la population. Les uns et les autres, nous sommes enclins à limiter nos réflexions et nos actions aux situations moyennes. (...)

Mon expérience des exercices de crise ou des colloques sur le sujet montre que, si vous proposez de travailler sur l'extrême ou l'inconcevable, vous déstabilisez vos interlocuteurs. Ce qui est extrême est insignifiant, dit-on souvent. Or c'est justement de cela qu'il s'agit lorsqu'il faut se préparer ou réagir à un événement comme le cyclone Katrina où chacun des éléments de la crise ­ les digues qui lâchent, les pillages, la difficulté à évacuer les personnes restées sur place... ­ sort des cadres. Je ne suis pas sûr que l'on aurait accepté d'émettre l'hypothèse d'une interruption des vols d'hélicoptères parce qu'ils se font tirer dessus par des individus armés dans une simulation de crise. Impossible, se serait-on écrié. Il est indispensable d'être excellent à l'intérieur des cadres habituels pour la plupart des situations. Mais oser se poser des questions hors cadre, c'est là qu'on nous attend, décideurs, experts, grand public.

Nous sommes tous actuellement dans la situation de l'habitant de la Nouvelle Orléans qui sait qu'un ouragan potentiellement dévastateur arrive et qui ne veut ou ne peut pas partir. Nous sommes des habitants de la Terre, des ouragans arrivent, et nous envisageons juste de fermer les volets et d'acheter quelques bouteilles d'eau et boîtes de conserve.

Oser poser des questions hors cadre est extrêmement difficile. Nos hommes politiques, dans leur très très grande majorité, ne le peuvent pas, ne le conçoivent même pas. Ne les attendons pas !



vendredi 2 septembre 2005

Pour une nouvelle politique énergétique

Où comment fixer un cap et rouler dans une autre direction

Réactions d'Hélène Gassin, chargé de mission énergie à Greenpeace France aux récentes déclarations de Chirac. Il a déclaré lors du lancement de la nouvelle Agence de l'innovation industrielle (AII) à Reims que "le prix du pétrole risque d'être durablement élevé" et que "le renouveau de notre politique énergétique est indispensable". Ce renouveau "passe par des politiques d'économies d'énergie, mais aussi par la mise au point de nouvelles technologies." Toujours selon M. Chirac, "c'est une nécessité pour la planète. C'est aussi un marché dont le potentiel est gigantesque."

Pour rappel, dans le cadre de la Loi sur l'énergie adoptée récemment, la France s'est engagée à diviser par 4 ses émissions de CO2. Or, ce n'est pas le nucléaire qui va nous aider car nos voitures, nos camions ne marchent pas au nucléaire ! L'état doit promouvoir le fret, travailler sur la réduction des circuits de distributions, soutenir le développement des transports en commun efficaces etc... Nous devons anticiper, avoir une longueur d'avance. Par exemple, lorsqu'une municipalité décide d'implanter une zone commerciale, elle doit tenir compte, entre autres, des déplacements que cela engendrera. Il faut être à l'écoute des habitants pour développer des transports publics adaptés à leurs besoins . C'est plutôt vers ce genre d'innovation politique et sociale que les financements devraient aller.

Ce qui me semble intéressant dans ces remarques, c'est que les innovations vers lesquelles il faut tendre sont principalement de nature politiques et sociales, plutôt que technologiques. Que l'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas écrit. Les innovations technologiques sont utiles et nécessaires. Mais elles seront largement inopérantes si on continue de reproduire les schémas de ces cinquante dernières années en matière d'aménagement urbain ou de prise de décision. Il est nécessaire d'intégrer les questions énergétiques et environnementales au sens large dans l'ensemble de nos aménagements en pensant non pas aux prochaines élections mais aux prochaines générations. Et pour que cela ne reste pas à l'état de doux rêve, il me semble important de porter ces préoccupations au niveau local.

Plus facile à dire qu'à faire et il y a tant à faire. Certes.
Mais le coût de l'inaction est bien plus important.



En finir avec la junk politique

Où comment on peut toujours y croire

J'ai bien aimé la chronique de Daniel Schneidermann dans le libé d'aujourd'hui. Il commente cette petite phrase que l'on a tous si souvent entendu aux journaux télévisés. «Et maintenant, la politique». Comme si les sujets précédemment traités (les logements insalubres et le prix du pétrole ce jour là) n'en étaient pas. De la politique.

Quand on annonce donc la rubrique "politique", c'est le jeu des petites phrases et autres parades de coq qui nous est donné en pature. C'en est devenu un sujet à part entière. Les combats d'appareils et autres manifestations des ambitions personnelles. A tel point, note Daniel Schneidermann, que les hommes politiques peinent à placer leurs propositions ou arguments durant leurs entretiens avec les journalistes. Quoi ? Un avis ? Mais n'est-ce pas là la marque de votre future candidature ?

Alors à qui la faute ? Aux politiques ? Aux journalistes ? Au mélange des genres ? Je ne sais pas vraiment, mais il est évident que nous aurions tous à gagner à laisser de côté les jeux politiques pour la faire vivre. La Politique.

Pour info, Daniel Schneidermann tient le Big Bang Blog avec David Abiker et Judith Bernard.



mardi 23 août 2005

Piratage de BD

Où comment se faire expliquer les choses par BB

Et bien non, il ne s'agit pas de Brigitte Bardot (je m'en voudrais, tiens !) mais de Bruno Bellamy. Bien connu des anciens lecteurs de Casus Belli (je dis ancien parce que je ne sais pas ce qu'il en est actuellement... Le jeu de rôle est-il encore vivant ?), ou des lecteurs de la presse informatique (Le Virus Informatique, Les Puces Informatiques, par ex.), il est également auteur de BD (la série "Sylfeline"). C'est à ce titre qu'il a été interviewé par le site PCInpact.com à propos du piratage de BD sur les réseaux p2p. C'est très intéressant et permet d'avoir le point de vue d'un auteur loin de toute l'agitation du milieu de la musique.
Et pour montrer le style, voici une bellaminette de l'époque Casus pour illustrer un article sur l'univers des princes d'Ambre (licorne inside).
Ambre
J'en entends un dans le fond dire que ça ne ressemble pas à l'univers de Florence Magnin. C'est vrai, mais c'est pas mal quand même.

Ambre



lundi 22 août 2005

Quand Noël rencontre Edgar

Où comment donner un peu d'ampleur à la politique.

Je viens de lire coup sur coup deux textes intéressants.

  • Le rapport d'Edgar Morin à propos du Débat National sur les Energie. La version comprenant les conclusions des deux autres rapporteurs est disponible ici. Il indique d'abord des conclusions énergétiques qui tiennent en quatre point avant de développer une conclusion plus générale.
  1. Que les économies (quantitatives) soient compensées par des gains en qualité.
  2. Faire grand effort sur les énergies renouvelables conçues à la fois séparément et comme un tout.
  3. Attendre 2010 pour le nucléaire EPR.
  4. S’orienter vers une politique de civilisation.

A partir des impératifs de sécurité, d’autonomie, de sauvegarde de notre environnement, et inséparablement de promotion de la qualité de la vie, pourra être définie une politique qui ne se bornerait pas à varier taxations, détaxations, contrôles. Ce serait une politique d’orientation, de régulation, de contrôle, de réforme.
La politique d’économie devrait être une politique où la restriction serait synonyme, non de privation, mais de tempérance. Elle comporterait une campagne contre les « intoxications » (auto) et les dilapidations, pour les recyclages et pour la promotion du qualitatif par rapport au quantitatif.
Une telle politique, qui dépasse les simples économies et les simples aménagements, comporterait réorientation et réorganisation, concernant tous les secteurs de la vie sociale et individuelle. (...)

Une nouvelle politique nécessiterait l’action conjointe de l’Etat, des collectivités publiques, des associations privées et des citoyens. Elle appellerait ce qu’un sociologue a appelé une « gouvernance de concertation ». Elle nécessiterait de conjuguer la socio-regulation, l’eco-regulation et l’ego-regulation . Elle devrait affronter non seulement lobbies et corporatismes mais aussi apathie et indifférence. Elle appelle un éveil citoyen lequel se produirait par la prise de conscience des problèmes vitaux qui sont impliqués dans ce mot « énergie ». (...)

Comme la voie suivie jusqu’à présent nous conduit à l’aggravation de tous ces maux et périls, il s’agit par prises de consciences et reformes, de changer de voie, de changer de modèle. Dès lors, le mot de développement, même sous sa forme adoucie de « durable », ne convient plus. Il faudrait concevoir un épanouissement humain.

Le débat n'est plus entre réformistes et révolutionnaires, ni entre contestataires et gestionnaires, mais entre une politique d'accompagnement visant à réduire les inégalités du libéralisme et une politique de transformation structurelle de la société que la gauche n'a pas osé engager lorsqu'elle était au pouvoir, ce qui a conduit au désastre du 21 avril 2002. (...)

Il est temps de rompre avec le modèle de développement industrialiste et d'engager notre pays sur des voies autres que celles tracées par les lobbies du bâtiment, des travaux publics, de l'automobile et du pétrole, de l'agroalimentaire, de la chimie, de l'EDF et du nucléaire ou des industries de l'armement... Dans chacun de ces secteurs, la gauche devra proposer des politiques de reconversion, de formation visant à sécuriser les parcours professionnels de ceux qui y travaillent. (...)

Il ne s'agit donc pas de «moraliser» le capitalisme mais de changer de logique en faisant converger autour d'exigences communes, les mouvements sociaux et la société civile qui contestent cette marchandisation du monde et des hommes.

A l'heure des problèmes écologiques majeurs, chaque citoyen, chaque être humain est concerné. Les changements de comportements peuvent permettre de ralentir la course folle dans laquelle nous sommes embarqués. Mais ces petites rivières ne seront rien si elles ne se rejoignent pas en un grand fleuve que serait la réorientation des objectifs de nos sociétés de la création de valeurs monétaires vers la re-création de lien et de sens entre nous et pour nous.



dimanche 21 août 2005

Eugen Drewermann

Où comment découvrir un penseur en en cherchant un autre.

Alors que je cherchais des informations sur Edgar Morin et la complexité, je suis arrivé sur le site de Claude Rochet, énarque dont le site est consacré aux sciences de la complexité et à la philosophie politique. Sur sa page principale, il a placé le texte suivant :

Il arrive un moment où la question n'est plus de continuer à accumuler de nouvelles connaissances, de nouveaux discours, d'autres théories encore; tout à coup il s'agit de trouver, avec sa passion, son désir, son instinct, un point fixe d'où l'on puisse maîtriser les choses. La question n'est plus de l'origine des choses et de leur fonctionnement; la question urgente devient soudain celle du sens de ces données (...)

On fait alors l'expérience que ce point vers lequel tout converge, ce centre de la signification de toute chose accessible à la connaissance, ce n'est pas par un effort d'énergie qu'on y accède, au contraire: toute attitude active d'acquisition de connaissances doit céder le pas à une paisible attitude de contemplation, d'écoute, de vision, de descente en soi.

Cette seule chose essentielle, on ne peut pas la forcer, c'est une rencontre, quelque chose qu'on trouve sans le chercher.

Le sens de toute choses, on ne peut l'inventer; la raison dernière des choses, on ne peut la fonder sur la raison: lorsque l'on rencontre cet essentiel, on a le sentiment d'une unité dernière, suprême, le sentiment (...) d'avoir trouvé ses repères, son équilibre intérieur, où tout questionnement est désormais inutile.

L'unique chose qui soit essentielle est enfin trouvée. Et à partir de cette chose, il est enfin permis de vivre.

DrewermannIntrigué, et curieux que je suis, j'ai suivi le lien en bas de page pour en apprendre un peu plus sur l'auteur. Il s'agit de Eugen Drewermann, prêtre, théologien et psychanalyste jungien allemand. Sacré mélange !!

A l'heure des JMJ et de l'exhaltation retransmise en mondovision, cet auteur de quelque soixante ouvrages n’a de cesse de démolir pierre par pierre l’édifice romain, de s’attaquer à ses dogmes et de « libérer la foi de la papauté » comme l'indique cet article du Monde Diplomatique qui lui est consacré en juillet 1997.

Lors de son passage dans une université canadienne, il lui a été posé la question de savoir quelle serait la religion de l'avenir.

"Ce sera une religion qui répondra à trois conditions, a répondu le théologien. Elle devra d'abord inclure la dimension psychologique. Quand les hommes et les femmes que je reçois en consultation parlent de Dieu, ils en viennent tôt ou tard à parler de leur père ou de leur mère... Cela m'attriste beaucoup. Deuxièmement, la religion de l'avenir devra être écologiquement intégratrice. C'est une exigence de l'époque moderne depuis Darwin. La religion et l'éthique sont anthropocentriques. Enfin, la religion de l'avenir sera interculturelle. Actuellement, pour devenir chrétien, il faut d'abord devenir occidental."

Un programme intéressant à mon avis. Quant à Edgar Morin, il n'est certainement pas sur edgar-morin.com. ;-(



jeudi 18 août 2005

A propos de John Le Carré

"Je ne pense pas être un radical, mais je suis en colère, oui. Mais, après tout, c'est l'attitude classique d'un vrai libéral anglais."

Un article intitulé ''La colère de John Le Carré : la guerre en Irak "a attisé le terrorisme"'' est paru dans l'édition du Monde du 23 juillet.

"Il n'y a aucune logique dans le terrorisme, observe-t-il. Lui trouver une logique serait déjà lui conférer une dignité qu'il ne mérite pas. On ne peut l'excuser. Mais on doit chercher à l'expliquer. Lorsque quelqu'un veut vous tuer, il est utile de savoir pourquoi. Et c'est quelque chose qu'on cherche à nous décourager de faire, parce que Bush et Blair ne peuvent pas laisser établir un lien entre les attentats et la guerre en Irak."

"M. Bush ne cesse de répéter que le mode de vie des Américains est le seul qui vaille. C'est à mes yeux un discours fondamentaliste. L'idée que ce mode de vie est universellement exportable est obscène. Si vous admettez un concept de type orwellien selon lequel l'Amérique est le bien, et l'islam le mal, il n'y a plus aucune souplesse de pensée."



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