Amnésie temporaire

Traité d'athéologie

Traité d'athéologiePetite parenthèse dans ma boulimie de bouquins de SF, je me lance dans le tout récent Traité d'athéologie de Michel Onfray. Je n'en suis qu'au début de cet essai où l'auteur, par ailleurs créateur de l'Université populaire de Caen, appelle de ses voeux "un athéisme argumenté, construit, solide et militant" (dixit la quatrième de couv'), et déjà je suis interpelé par le passage expliquant l'origine de l'athéisme.



"Certes l'athée existe dans la Bible - Psaumes (X,4 et XIV, 1) et Jérémie (V, 12) -, mais dans l'Antiquité il qualifie parfois, souvent même, non pas celui qui ne croit pas en Dieu, mais celui qui se refuse aux dieux dominants du moment, à leurs formes socialement arrêtées. Longtemps l'athée caractérise la personne qui croit à un dieu voisin, étranger, hétérodoxe. Non pas l'individu qui vide le ciel, mais celui qui le peuple avec ses propres créatures..."

Je dois avouer que je ne connaissais pas cet usage primitif du mot "athée". Après réflexion, il s'explique très bien puisque le désenchantement du monde est tardif dans l'histoire humaine (cf. Max Weber) et que les dieux ou êtres enchantés peuplent l'univers pendant des Siècles.

"De sorte que l'athéisme sert politiquement à écarter, repérer ou fustiger l'individu croyant à un autre dieu que celui dont l'autorité du moment et du lieu se réclame pour asseoir son pouvoir. Car Dieu invisible, inaccessible, donc silencieux sur ce qu'on peut lui faire dire ou endosser, ne se rebelle pas quand d'aucuns se prétendent investis par lui pour parler, édicter, agir en son nom pour le meilleur et le pire. Le silence de Dieu permet le bavardage de ses ministres qui usent et abusent de l'épithète : quiconque ne croit pas à leur Dieu, donc à eux, devient immédiatement un athée. Donc le pire des hommes : l'immoraliste, le détestable, l'immonde, l'incarnation du mal. A enfermer illico ou à torturer, à mettre à mort."

La religion comme levier de pouvoir dans notre monde terrestre. L'exclusion au lieu du relié.

"Difficile dès lors de se dire athée... On est dit tel, et toujours dans la perspective insultante d'une autorité soucieuse de condamner. La construction du mot le précise d'ailleurs : a-thée. Préfice privatif, le mot suppose une négation, un manque, un trou, une démarche d'opposition. Aucun terme n'existe pour qualifier positivement celui qui ne sacrifie pas aux chimères en dehors de cette construction linguistique exacerbant l'amputation : a-thée donc, mais aussi mécréant, a-gnostique, in-croyant, ir-rékigieux, in-crédule, a-religieux, im-pie (l'a-dieu manque à l'appel !) et tous les mots qui procèdent de ceux-là : irréligion, incroyance, impiété, etc. Rien pour signifier l'aspect solaire, affirmateur, positif, libre, fort de l'individu installé au-delà de la pensée magique et des fables."

Où l'on retrouve la difficulté de désigner une idée ou un concept qui se trouve en opposition avec l'ordre des choses tel qu'il est admis par la société. Les partisans de la décroissance soutenable sont confrontés au même problème. En utilisant ce terme de décroissance, ils se situent dans l'anti- et peinent à insuffler une valeur positive à un concept naissant. Les mots désignent nos représentations mentales et, ce faisant, façonnent notre imaginaire. Comment se nettoyer la tête ? En inventant et partageant des améliorations à notre langue. Il y a du pain sur la planche !!

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